Un simple rappel à l’ordre, même écrit, n’est pas une sanction disciplinaire
Published on :
19/12/2018
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Cass. Soc. 19 septembre 2018 n° 17-20193
La frontière entre la volonté de rappeler un salarié à ses obligations contractuelles et celle de le sanctionner pour un manquement à celles-ci, peut parfois être ténue.
L’enjeu est toutefois de taille puisque la qualification de la mesure imaginée par l’employeur – simple rappel à l’ordre ou sanction disciplinaire – commande l’application de la procédure disciplinaire, laquelle offre certaines garanties au salarié, comme par exemple l’interdiction faite à l’employeur de sanctionner un salarié 2 fois pour un même fait (Cass. soc. 13 janv. 1993, n° 92-40529).
Dans un arrêt du 19 septembre 2018 (n°17-20193), la Cour de cassation se prononce sur la nature, disciplinaire ou non, d’un simple rappel à l’ordre.
Dans cette affaire, un salarié avait procédé à la diffusion électronique de cours malgré l’interdiction qui lui avait été faite.
Après que l’auteur du support s’en soit plaint à la direction, cette dernière a adressé au salarié, mais également à deux autres collaborateurs, un courriel au terme duquel l’interdiction de procéder à une communication électronique était rappelée, leur étant également demandé de ne pas réitérer de tels agissements.
Un mois plus tard, l’employeur a engagé une procédure de licenciement pour faute grave à l’encontre du salarié qui avait diffusé le support de cours, invoquant, parmi d’autres griefs, le manquement tiré de la diffusion électronique des cours.
Celui-ci a contesté son licenciement faisant notamment valoir que le courriel adressé par la direction à plusieurs salariés dont lui-même, rappelant l’interdiction de diffuser les cours par voie électronique, constituait une sanction disciplinaire et que dès lors, l’employeur avait épuisé son pouvoir de sanction et ne pouvait donc invoquer ce grief au soutien du licenciement.
La cour d’appel a fait droit à cette thèse considérant que la remarque adressée au salarié par la direction avait la forme d’un rappel à l’ordre et que ce rappel à l’ordre traduisait la volonté de l’employeur d’exercer ses pouvoirs d’instruction et de direction, donc son pouvoir disciplinaire.
Au visa de l’article L. 1331-1 du Code du travail qui dispose que « constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération », la Cour de cassation censure cette décision et retient que :
– une « remarque » se bornant à rappeler à plusieurs salariés l’interdiction d’un comportement donné et les invitant à ne pas le reproduire ne traduit pas la volonté de l’employeur de sanctionner les faits ;
– un rappel à l’ordre ne constitue pas une sanction disciplinaire.
Il résulte donc de cet arrêt que la mesure disciplinaire suppose une manifestation de l’employeur de sanctionner le fait qu’il reproche au salarié.
La Cour de cassation confirme ce faisant que la volonté de sanctionner de l’employeur est désormais le critère qui permet de distinguer la sanction disciplinaire du simple rappel à l’ordre (voir Cass. soc. 12 novembre 2015, n° 14-17615).
Elle affine également les indices permettant à l’employeur de déterminer le degré à compter duquel il est possible de considérer qu’un écrit constitue un reproche suffisant pour s’analyser en une sanction disciplinaire : le simple rappel fait à un salarié d’une interdiction en lui demandant de la respecter ne manifeste pas l’intention de sanctionner puisqu’il ne consiste pas en l’expression d’un grief, c’est-à-dire d’un reproche justifié par un comportement jugé comme fautif.
En pratique : attention à la formulation choisie pour faire part de son mécontentement à un salarié, en fonction de l’objectif poursuivi ; TEN France est à votre disposition pour vous assister dans la prise de décision et sa mise en œuvre.
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